La création de la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame
L'évêque de Strasbourg et le chapitre de la cathédrale fondent l'Œuvre Notre-Dame au début du XIIIe siècle pour gérer les dons, les legs et organiser le chantier de reconstruction de la cathédrale romane.
L'institution appelée Das Werk Unserer Lieben Frau (Frauenwerk) traduit par Œuvre Notre-Dame est mentionnée pour la première fois vers 1224-1228 sous le terme de opus sancte Marie. Elle apparaît dans un inventaire des terrains appartenant au chapitre de la cathédrale de Strasbourg, nommé Liber regulae. Dans le même article est aussi mentionné le vocable magistri operis, c'est à dire maîtres d'œuvre dans le sens d'administrateurs.
La bataille de Hausbergen du 8 mars 1262, mettra fin à la domination épiscopale sur Strasbourg qui devient alors ville libre d'Empire. À cette occasion, l'évêque et le chapitre perdent quelques-unes de leurs prérogatives sur l'Œuvre Notre-Dame. Elle sera administrée par le magistrat de Strasbourg à partir des années 1280-1290. Cette gestion est concédée par les chanoines de la cathédrale qui conserveront cependant un certain contrôle jusqu'en 1648.
L'organisation de la Fondation au Moyen Âge
L'Œuvre Notre-Dame est présidée par un receveur ou régisseur (Schaffner). Sa mission consiste notamment à consigner les recettes, les dépenses et les dons mais aussi surveiller et rémunérer les artisans et autres employés. La gestion de la Fondation est cependant contrôlée par trois curateurs ou administrateurs (Pfleger), nommés par le magistrat de la Ville.
Le maître d'œuvre (Werkmeister) dirige l'atelier des tailleurs de pierre, sculpteurs, maçons, forgerons, menuisiers, charpentiers et verriers. Il est assisté par le contremaître ou de l'appareilleur (Parler ou Parlier).
Les carrières de grès de la Fondation sont exploitées par les maîtres de carrières (Grubenmeister).
La Fondation de l'Œuvre Notre-Dame, Loge Suprême du Saint Empire romain-germanique
La flèche de la cathédrale s'achève en 1439. Cet événement favorisera l'accession de la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame au titre de Loge Suprême du Saint-Empire romain germanique. En 1459, à Ratisbonne, le maître d'œuvre de Strasbourg devient alors juge suprême de toutes les autres loges dont celles de Cologne, Vienne et Berne.
Après la guerre de Trente ans (1618-1648), le traité de Westphalie rattache une grande partie de l'Alsace à la France en 1648. Plus tard, en 1681, Strasbourg capitule devant Louis XIV et devient française. La cathédrale est à nouveau catholique après être demeurée protestante depuis 1529, au début de la Réforme. Strasbourg perd peu à peu son statut de Loge suprême qui sera définitivement abrogé en 1727 par décret impérial. En 1789, la cathédrale devient propriété de l'État et les biens de la Fondation sont nationalisés en 1793. L'administration de la Fondation est confiée à la Régie des domaines jusqu'en 1802 puis restituée en 1803 par arrêté consulaire de Napoléon Bonaparte à la ville de Strasbourg.
C'est un événement majeur : cet arrêté constitue encore la base légale de l'activité de la Fondation dont les biens et revenus restent affectés à l'entretien et à la conservation de la cathédrale de Strasbourg.
Nonobstant les aléas de l'Histoire (guerres et des changements de nationalité), le statut de la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame ne sera pas remis en question. Elle est aujourd'hui une institution unique en France.
La Fondation de l'Œuvre Notre-Dame au service de la cathédrale
La Fondation de l'Œuvre Notre-Dame a depuis 1999 (convention cadre entre l'État et la Fondation) le statut de maître d'ouvrage délégué pour certains chantiers d'entretien, de conservation et de restauration de la cathédrale. La maîtrise d'œuvre des opérations est assurée par un Architecte en Chef des Monuments Historiques, depuis 2013 Pierre-Yves Caillault est chargé de cette mission.
Patrimoine culturel immatériel
Depuis le 27 juin 2017, la Fondation est inscrite à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel en France sous le libéllé : Les savoir-faire de la Fondation de l’Œuvre Notre-Dame appliqués à la cathédrale de Strasbourg et sa collaboration coutumière. Elle est également depuis le 17 décembre 2020, inscrite au le Registre des bonnes pratiques de sauvegarde de l'UNESCO avec 17 autres ateliers de cathédrale sous l'intitulé : Techniques artisanales et les pratiques coutumières des ateliers de cathédrales, ou Bauhütten, en Europe - savoir-faire, transmission, développement des savoirs, innovation.
La maison de l'Œuvre Notre-Dame
Depuis le Moyen Âge, le siège de la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame est situé au sud de la cathédrale.
En 1295, apparaît pour la première fois la mention d'une maison léguée à la Fondation par son administrateur Ellenhardt. Celle-ci sera détruite trois ans plus tard lors d'un incendie.
La maison actuelle de l'Œuvre Notre Dame est divisée en deux bâtiments :
- L'aile gothique est construite en 1347 par le maître d'œuvre de la cathédrale Johannes Gerlach. Elle est restaurée au XVIe siècle et ses baies sont agrandies. Elle sera endommagée lors du bombardement du 11 août 1944.
- L'aile Renaissance est érigée entre 1579 et 1582 par le maître d'œuvre Hans Thoman Uhlberger.
Elle abrite deux institutions : la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame (bureaux administratifs) et le Musée de l'Œuvre Notre-Dame.
Les ateliers sont installés à proximité de la cathédrale comme l'atteste des gravures du XVIe et XVIIe siècles.