La genèse du projet
C'est en novembre 2015, à l'initiative de la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame, qu'une demande d'autorisation d'étude archéologique de bâti sur le transept sud de la cathédrale de Strasbourg a été transmise à la Conservation Régionale des Monuments Historiques Grand Est (CRMH)et instruite par cette dernière et par le Service Régional de l'Archéologie (SRA) tous deux relevant de la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC). Ce projet, porté par l'université d'Innsbruck, notamment par le professeur, docteur, ingénieur Klaus Tragbar de l'Institut für Architekturtheorie und Baugeschichte (Institut de Théorie architecturale et d'histoire de l'architecture), a pour vocation d'étudier la construction du double portail et des deux tympans de style gothique, intégrés dans une architecture de style roman.
Le projet est financé par le Land Tirol (Autriche) et la Tiroler Wissenschaftsförderung (Agence régionale de la recherche du Tyrol) et également soutenu au plan scientifique, par l'Université de Strasbourg avec le concours du professeur Marc Carel Schurr.
L'archéologie du bâti en renfort
L'architecte et archéologue du bâti llona Katharina Dudziński, qui vient de soutenir une thèse de doctorat sur le jubé du chœur occidental de la cathédrale de Naumburg (XIIIe siècle), a pour mission de déterminer si les tympans ont été mis en place dès l'origine, ou s'ils ont été insérés au cours d'une campagne de travaux postérieure.
Cette question, non résolue, a des incidences majeures du point de vue de l'histoire de l'art et de l'architecture, ce portail étant aujourd'hui considéré comme le maillon essentiel de la pénétration du style gothique dans l'espace germanique, encore marqué par l'architecture romane tardive.
L'opportunité offerte par la présence des échafaudages, à l'intérieur comme à l'extérieur du portail, permet d'accéder au plus près des informations archéologiques et à des données normalement hors de portée. Les méthodes de recherches, non destructives, reposent essentiellement sur une approche "stratigraphique" appuyée sur un enregistrement graphique, photographique et écrit des données. Les relevés seront réalisés manuellement, à l'échelle 1/20.
Les premiers résultats
Ilona Katharina Dudziński exploite en partie les plans photogrammétriques réalisés par la société GBVD Vomstein pour le compte de la Fondation. Elle a complété ces plans, ajouté ses observations pierre à pierre, tels que les aspects de taille, les éléments manquants et l'ensemble de ses constats concernant la construction. Elle a également dessiné l'élévation intérieure, la coupe du portail et cartographié les étapes supposées de l'édification du portail et de ses tympans. Ses premières constatations montrent que le chantier ne s'est pas arrêté, que le changement de projet n'est pas brutal. Il s'agit d'une évolution dans la construction bien que les nouveaux tympans soient plus grands et plus ouvragés que ceux prévus dans le projet d'origine. Ilona affirme ainsi que les éléments de la construction ont été taillés dans leur ensemble mais posés seulement en partie. Les tympans ont ensuite été sculptés dans le nouveau style venu d'Île-de-France (probablement Chartres) sans doute à l'occasion d'un changement d'équipe ou d'architecte (ou sur demande du commanditaire qui se trouve parmi l'évêque et les membres du chapitre de la cathédrale de Strasbourg) et ont été insérés dans l'architecture en cours d'érection.
Les déductions, recherches et conclusions d'Ilona feront l'objet d'un rapport détaillé (en français) d'ici quelques mois et viendront développer le présent article.