Vincent habite Haguenau mais, a vu le jour à Strasbourg dans le quartier du Neuhof.
Il est depuis toujours imprégné d'artisanat, son père menuisier à la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame lui ouvre les portes de l'atelier et transmet à son jeune fils la passion du travail bien fait. Cet artisan travaillera à la Fondation jusqu'à son décès en 1979 et laisse à Vincent qui à alors 8 ans, cette phrase en héritage « tu feras tailleur de pierre, c'est un beau métier ».
Un beau métier
À 14 ans, Vincent relève le défi et commence son pré-apprentissage de 2 ans à la Fondation de l'Œuvre Notre-Dame. Il sera titulaire en 1989 d'un CAP de Taille de pierre suite à son apprentissage de 2 ans.
En 1990, après son service militaire il est recruté par la Fondation. Il se lance alors dans un nouveau challenge et obtient en 1999 le Brevet de maîtrise. Il a présenté lors de l'épreuve pratique une copie d'une base d'une colonne d'une abbatiale à Blois.
Il a aussi en mémoire une expérience tout à fait enrichissante, celle de la restauration du Temple de Létô sur le sanctuaire antique du Letton en Turquie.
Depuis quelques mois, Vincent a commencé la taille en copie exacte, du dais du XVIe siècle qui couronne la sculpture de saint Arbogast. Travail titanesque s'il en est, sa précision et sa finesse se confrontent cette fois-ci au style « ampoulé » du XVIe. Car habituellement c'est sur la restauration d'éléments d'architecture gothique sur laquelle œuvre Vincent et c'est d'ailleurs ce style qui lui plaît le plus :
« je n'ai pas d'endroit préféré sur la cathédrale, nous dit-il, même si la flèche est emblématique c'est la cathédrale dans sa globalité que j'aime et surtout son architecture gothique ». Il travaille aussi sur le chantier, parfois à la pose ou à la conservation car pour lui « c'est important de ne pas être déconnecté du chantier ».
De la taille de pierre mais pas que !
Ce qu'affectionne Vincent outre son métier de tailleur de pierre, c'est aussi prendre part à d'autres activités, il cite entre autres sa participation aux inventaires des plans anciens, des pierres du lapidaire qui lui permettent d'appréhender la cathédrale sous un autre angle.
Il est aussi très attaché à la compréhension des aspects de taille et à leur réemploi lors des restaurations actuelles :
« Il est important d'avoir ce débat avec l'architecte en chef et le bureau d'études, doit-on oui ou non remettre les aspects de taille observés sur les restaurations du XIXe ou réutiliser ceux laissés par les outils du Moyen Âge comme la polka ? », la préférence de Vincent va vers cette dernière proposition et il ne tarit pas d'arguments sur le sujet.
Une des autres activités qui lui tient à cœur est celle des visites pédagogiques des ateliers aux enfants, des primaires aux lycéens car pour lui l'important est la transmission et solliciter ainsi l'intérêt des jeunes générations pour le patrimoine et sa préservation.
Ces échanges l'ont d'ailleurs tout naturellement conduit pendant ses activités de loisirs à s'investir dans des mouvements d'actions populaires dont l'Action catholique des enfants :
« c'est un lieu de rencontre, d'écoute et d'actions. L'écoute d'un enfant est essentielle, il doit être convaincu de l'importance de sa parole, il peut alors changer son monde et changer le monde ».
Vincent est aussi très attaché à la nature, vous pourriez ainsi le rencontrer au détour d'une forêt, dans son jardin à cultiver avec patience ses légumes ou à faire du bois.
Mot de la fin
« Je m'inquiète du futur, jusqu'à quand nous pourrons continuer à faire notre travail fidèlement et respectueusement. Nous avons une responsabilité collégiale quant à la préservation de la cathédrale et c'est aussi au quotidien qu'il faut s'y appliquer mais pourrons nous continuer ainsi dans un monde ou la rentabilité et les restrictions économiques se font déjà sentir. »
Publication 2015