Comprendre les changements d’états et soigner les maladies de la matière, c’est ainsi que l’on peut s’imager la conservation. Les mesures conservatoires sont pratiquées sur l’ensemble des matériaux constitutifs de la cathédrale comme les grès, les polychromies, les métaux, les mortiers et liants et les bois. Ces soins directs ou indirects qui caractérisent la conservation comportent la réalisation d’une étude, d’un constat d’état, d’un diagnostic associé à des analyses en laboratoire, à l’élaboration des traitements et aux interventions proprement dites.
À la Fondation de l’Œuvre Notre-Dame se sont des artisans spécifiquement formés à la conservation qui interviennent sur la cathédrale après une concertation la plus large possible entre les différents métiers et disciplines, entre empirisme et sciences au service de la préservation du patrimoine.

Lorsque les matériaux sont trop altérés, ils sont remplacés notamment, pour les éléments en grès, par des copies réalisées par les tailleurs de pierre et sculpteurs des ateliers.

Constat d'état, diagnostic et analyses en laboratoire

La nature et les causes de détériorations sont déterminées avant toute intervention.

La nature et les causes de détériorations sont déterminées avant toute intervention. Des cartographies pierre à pierre des différents désordres et constats sont réalisées au moyen d’investigations macroscopiques. Cette première étape est complétée par des observations microscopiques et parfois au-delà, toujours avec un regard alternant entre le détail et une vision globale.
 

Les principales études intègrent :
 

•  Des analyses pétrophysiques, pétrographiques et mécaniques de la nature, la taille et la disposition des grains composant les grès mis en œuvres et les grès de restauration, leurs porosités, leurs teneurs et types d’argiles, etc. ;
• Des analyses sur les natures et teneurs en sels solubles et leurs comportements thermique et hygroscopique contenus dans les grès ainsi que leurs origines possibles ;
• Des analyses des propriétés physico-chimiques sur les charges, matériaux inertes comme le sable, le gravier et les liants (chaux, ciments, résines) des mortiers, colles et adhésifs organiques et inorganiques ;
• Des analyses stratigraphiques sur les polychromies et leur support, physico-chimiques sur les éventuelles charges et liants organiques comme les colles naturelles d’origine animale telle que la caséine (protéine de lait), les huiles et résines ou liants minéraux comme ceux à     base de chaux mais aussi sur les pigments insolubles d’origine minérale ou végétale qui donnent les teintes des polychromies. Le terme polychromie regroupe les couches préparatoires ou apprêts, les badigeons et les décors peints ;
• Des analyses chimiques, isotopiques et physiques des métaux mis en œuvres et de restauration.

L’ensemble des analyses participent à l’identification, la compréhension des phénomènes d’altération mais également à préciser les contextes historique et chronologique et, enfin, à déterminer les matériaux de restauration adaptés.

Protocoles d'intervention

Pour chaque cas de figure, nous proposons un traitement de conservation-restauration adapté, directement ou indirectement sur l’objet dans les Demandes d'Autorisation de Travaux. La conservation-restauration comprend la conservation préventive, la conservation curative et la restauration. Des témoins de l’existant sont préservés en l’état afin de maintenir des vestiges sans traitements et interventions. Le traitement doit être le plus respectueux possible du matériau d’origine, ne pas modifier fondamentalement ses propriétés et être réversible dans la mesure du possible. Toutes ces mesures et actions doivent respecter la signification et les propriétés physiques de l’objet.

Actions de conservation curative et de restauration

Les traitements des grès comprennent essentiellement :
 

• Le nettoyage des suies, poussières agglomérées et autres dépôts ou colonisations végétales par l’actionmécanique et/ou chimique et/ou photonique et thermique de surface ;
• Le dessalement qui permet de réduire les teneurs en sels ;
• Le comblement, par injection de coulis comportant des charges et un liant siliceux ou à base de chaux, de fissures et fractures ;
• L’application de solins (couche de mortier de restauration discrète) pour consolider et protéger la surface d’un grès altéré et favoriser l’écoulement des eaux ;
• Le cloutage ou goujonnage au moyen d’agrafes et de goujons métalliques d’éléments désolidarisés et leur scellement. Les choix se feront selon les propriétés de dilatation et de résistance à la corrosion ;
• Le ragréage, c’est-à-dire une reconstitution partielle du grès et de sa forme architecturale en mortier de restauration afin de le protéger et d’en redonner une lisibilité ;
• La pose de greffes en grès et leur scellement ;
• La reminéralisation ou consolidation à base d'ester d'acide silicique ;
• La dérestauration des joints à trop forte hydraulicité, la consolidation des joints et la         réfection des joints.
   

Les traitements spécifiques des vestiges de polychromies portent sur :
 

• La fixation des écailles et des soulèvements de peintures et de décors peints par l’introduction d’un adhésif ;
• Le nettoyage de surface par des moyens mécaniques et/ou chimiques et/ou photonique et thermique ;
• La consolidation des décors peints sur leur support à l’aide de produits compatibles et adaptés ;
• La restitution partielle (restaurateur de peinture) voire virtuelle.
   

Les traitements des bois consistent à :
 

• Désinsectiser (insectes xylophages) ;
• Désinfecter (champignons) ;
• Nettoyer ;
• Consolider au moyen de renforts structurels ;
• Restaurer ;
• Protéger les surfaces.

Les traitements des fers portent sur :
 

• Le nettoyage ;
• La passivation (ralentissement de la vitesse de corrosion par film passif naturel ou         artificiel) ;
• La protection contre l’eau liquide ;
• La restauration.
  En parallèle il est essentiel d’assurer la maîtrise des écoulements des eaux par le maintien et l’entretien des couvertures, des coursives, des gargouilles, etc., mais aussi d’entretenir régulièrement l’édifice par le retrait des dépôts atmosphériques, organiques et issus de l’activité humaine.
   

Mises en œuvre

Les interventions se réalisent principalement in situ. Des éléments architecturaux déposés sont parfois traités en atelier pour de meilleures  conditions  d’interventions (contrôles hygrométrique, hydrique et thermométrique).
 

La palette d’instruments est variée avec :
 

• Outils manuels : le scalpel, la spatule, la seringue, le pulvérisateur, le pinceau et la         brosse, etc. ;
• Outils mécanisés : la micro- sableuse (par voie sèche), le laser, etc. ;
• Outils d’observations : les lampes U.V., blanche, la loupe binoculaire, le microscope, etc.
• Outils de mesures : la pipette de Karsten, le conductimètre, le test à l’éponge, le thermohygromètre, le capteur d’humidité de surface, etc.

Les produits d’applications utilisés sont :
 

•  Les compresses de dessalement ;
• Les compresses de nettoyage ;
• Les pelables ;
• Les gels ;
• Les reminéralisants ou consolidants à base de silicate d’éthyle ;
• Les différents mortiers hydraulique et aérien de pose, de joint et d’enduit, les coulis et les mortiers de restauration ;
• Les résines naturelles ;
• Les polymères thermodurcissable comme les résines époxydes et les polymères thermoplastiques comme les résines acryliques (colles ou fixatifs) ;
• Les hydrofuges à base de silane et siloxane.

Les produits sont remis en questions en tenant compte des évolutions scientifiques, de leurs évaluations et de leur stabilité dans le temps.

Enfin, toutes les interventions sont renseignées et suivies dans les rapports techniques et au moyen d’une documentation photographique sur l’état avant, pendant et après l’intervention.

Article mis à jour en avril 2021